Les faux-semblants de la relance

Comme il est difficile de se débarrasser des mauvaises habitudes ! Annoncer des chiffres ronflants et vertigineux destinés à impressionner et à montrer sa détermination, c’est vieux comme le monde ! Les « 100 milliards d’euros au moins » annoncés triomphalement par Emmanuel Macron le 14 juillet n’y dérogent pas. Il est recommandé d’y voir de plus près.

Le gouvernement allemand ayant annoncé un plan de 130 milliards d’euros, il fallait être à la hauteur. Quitte à mélanger des pommes et des poires dans la plus grande confusion, sans qu’il soit précisé ce qui prendra la forme de prêts à rembourser ou de subventions acquises. Ce n’est tout de même pas la même chose.

On ne peut s’en étonner, car sur les 460 milliards d’euros précédemment revendiqués en France, seuls 57,5 milliards ont creusé effectivement le déficit, le solde relevant de mesures de trésorerie – des différés de paiement – ou de prêts garantis par l’État.

Le Premier ministre a depuis apporté de premières précisions sur les enveloppes prévues. 40 milliards sont attribués aux entreprises, et trois fois 20 milliards à la transition écologique, l’emploi et la solidarité. Pour en savoir plus, il faudra attendre septembre, parait-il. En ce qui concerne les entreprises, qui se taillent la part du lion – au prétexte affiché de préserver l’emploi, mais sans véritables garanties – une baisse des impôts de production qui repose sur la valeur ajoutée est dans les tuyaux, pour un montant d’environ 6 milliards d’euros.

Mais le subterfuge ne s’arrête pas là. Le flou règne sur la comptabilisation ou non dans les 100 milliards des plans sectoriels déjà annoncés, en particulier pour l’aéronautique, l’automobile, le tourisme, les transports, le BTP… La même question se pose pour le volet emploi à propos des mesures prises en faveur de l’apprentissage et du chômage partiel de longue durée.

Question financement, on n’est pas plus avancé. Il va reposer sur l’endettement et un pactole de la Commission sans que les proportions entre les deux modes soient clarifiées, et pour cause : ses modalités et ses montants restent à déterminer. Quant aux impôts, dont il est catégoriquement affirmé qu’ils ne seront pas augmentés, cela est infirmé par le prolongement jusqu’en 2042 du prélèvement de la CRDS sur les revenus. Si ce n’est pas une augmentation des impôts, qu’est-ce que c’est ?

À cheval sur les principes, les dirigeants s’accrochent à deux d’entre eux : les impôts ne doivent pas augmenter et la dette doit être remboursée. Le premier a pour objectif principal de ne pas augmenter l’imposition des plus aisés, le second de préserver la rente. Sur le modèle des bad banks – les structures de défaisance destinées à soulager les bilans bancaires – et en élargissant la mission de la caisse initialement destinée à amortir progressivement la dette sociale (grâce à la CRDS), il est question de cantonner « la dette Covid-19 » afin de la rembourser à très longue échéance. Ce remboursement sera plus indolore, à condition que les investisseurs jouent le jeu.

La beauté de la chose pourra résider dans l’acquisition par les banques centrales et autres institutions financières des titres obligataires à longue maturité qui en seront l’instrument. Une manière déguisée de les mettre à contribution sans heurter de plein front le dernier tabou, celui du financement de la dette publique par la création monétaire. De sacrés roublards !

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